La fête de la Lune chez mes parents, 3
A l’après-midi, on était tous les deux un peu fatigués. On avait envie de faire la sieste, mais papa a voulu parler avec nous. Il m’a demandé de faire du thé. Dès que le thé a été sert, il a pris la parole. Il avait l’air très sérieux. Il parlait dans le Putonghua avec l’accent local. Il a insisté sur l’importance de la visite de Yi chez moi : « A partir d’aujourd’hui, ce n’est plus possible que vous ne preniez pas au sérieux votre relation. Il faut que vous restiez fidèles l’un à l’autre. Yi, si tu quittait ma fille, sa mère et moi deviendraient l’objet de moquerie de tout le monde. » Et puis, il est devenu plus calme et plus à l’aise. Il a parlé de sa philosophie de vie : savoir se contenter, rester optimiste, savoir estimer correctement la valeur de l’argent, etc. Quand Yi est allé réchauffer de l’eau, papa a changé de visage et m’a fait une grimace : « C’est pas mal le cours de ton papa, n’est-ce pas ? »
Le soir, Yi et moi, nous sommes allés au banquet de mariage de mon amie d’enfance. Quand nous sommes revenus, une lune toute ronde nous regardait avec tendresse. Yi conduisait la moto de papa le long d’une petite ruelle de la campagne et derrière lui, je le serrais dans mes bras...
A notre arrivée dans la maison, Papa et maman étaient en train de dîner. Je ne voulais pas me coucher si tôt, alors je suis allée regarder la télé. Yi m’accompagnait. Cinq minutes plus tard, papa est entré dans la chambre avec une enveloppe rouge à la main. C’était pour Yi, pour sa première visite à la maison. Et puis, Yi est allé prendre la douche, papa est parti aussi. Maman est venue me voir.
« Ton père veut que je parle à toi », m’a dit-elle avec un sourire forcé.
« Tu as dormi où hier soir ? »
J’étais gênée.
« La couverture que tu avais préparée pour moi ne suffisait pas pour la nuit, alors je...Mais rien ne s’est passé... »
Maman a ri : « Tu me prends pour un enfant. Tu aurais dû me demander de changer de couverture pour toi. Bon, c’est déjà ça... Attention de ne pas être enceinte. Ce garçon ne me déplait pas, mais le problème, c’est que vous n’habitez pas la même ville. »
« Pas de problème entre lui et moi ; on s’aime. »
« Pour ta part, je ne m’inquiète pas. Je sais que tu es une fille ferme dans l’amour, mais lui, résiste-il à la séduction des autres filles ? » (Le lendemain, quand j’ai répété ces mots de maman à Yi, il a éclaté de rire : « Ta mère ne te connaît pas du tout ! »)
La nuit même, dans les bras de mon homme chaud et suant, mes larmes n’ont pas cessé de couler silencieusement. Il semblait que c’était quelque part tout près de mon cœur où il s’approchait, entrait, où il s’éloignait, sortait ; il revenait, il repartait...Il s’y est installé. Je savais alors qu’il était en moi, qu’il faisait partie de moi et que ma vie serait pour toujours partagée avec lui.