Tocqueville censuré
L’autre jour, il y a eu une rencontre avec des écrivains méditerranéens dont un écrivain français m’a demandé secrètement : « La liberté d’expression en Chine, c’est comment ? » Il a tout de suite précisé la question : « Le prix Nobel attribué à Liu Xiaobo, tu le sais ? » J’ai répondu que oui, que je l’ai su au premier moment grâce à un de mes étudiants qui avait écrit une lettre au jury pour soutenir l’écrivain. « Alors, quelle était ta première réaction ? » J’ai réfléchi pendant quelques secondes et répondu honnêtement : « Je n’avais pas de réaction. » C’est vrai que de la nouvelle, je n’étais ni joyeuse ni surprise. Je suis parmi ceux qui savent supporter la censure des livres et de l’internet, la corruption de partout, l’injustice ruinant des familles, la pollution empêchant de respirer…Quelquefois j’ai de la colère. Par exemple, il y a une semaine, j’ai publié sur un blog que je partage avec mes étudiants un extrait de De la démocratie en Amérique. Le texte (où Tocqueville parle des avantages des petites nations) ne pouvait pas apparaître car il avait besoin d’être examiné. J’ai attendu trois jour pour avoir le résultat : texte censuré ! Il faut savoir que la traduction du livre avait été publiée au début des années 90 par une des plus importantes maisons d’édition de Chine. Absurde, cette censure d’internet ! Alors j’ai écrit une protestation au hébérgeur en expliquant que la traduction que je menais était légal, que j’avais le contrat avec la grande maison d’édition Yilin. Trois heures plus tard, le texte est apparu sur le blog. Les droits ne sont pas donné ; il faut lutter pour. Mais pour la plupart du temps, je ne fais rien que cultiver mon jardin.